Nous sommes tous des moutons

Nous sommes tous des moutons

Quelques petites arnaques de restaurants pour gonfler votre addition (2e partie)

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Suite de l’article précédent portant sur les trucs de restaurateurs et de serveurs afin de grappiller quelques sous supplémentaires lors de vos repas au restaurant. Pour éviter de se faire arnaquer, il ne suffit que de rester à l’affut et lucide.

 

Par Ivanhoé

Mis en ligne le le 20 juillet 2019

 

Dans la première partie de cet article, il était question d’astuces plus ou moins malhonnêtes utilisées par les restaurateurs et les serveurs pour nous dépouiller à notre insu lorsque nous nous retrouvons dans un restaurant. Celles-ci ont toutefois l’inconvénient d’être relativement décelables par des clients plus avisés que d’autres. Et dans ce cas, elles peuvent causer plus de tort que de bienfaits, en ce que la réputation de l’établissement qui en usent risque d’en subir les contrecoups.

 

C’est pour cette raison que certains restaurants refusent d’y avoir recours. Par contre, sous le couvert d’un service à la clientèle le plus respectable qui soit, ils font appel à d’autres techniques (1) qui sont beaucoup plus subtiles en ce qu’elles se dissimulent dans un endroit aussi inoffensif que la carte du menu.

 

Les prix

 

Le premier procédé est utilisé autant par les commerçants que par les restaurateurs. Il est vieux comme la Terre. Il remonte en effet dans la nuit des temps. Et il est tellement vieux que tout le monde le connait – en principe.

 

Il consiste à terminer les prix des plats par les chiffres 95, 98 ou 99 cents (centimes). De cette manière, et par exemple, un plat n’est pas vendu 40,00 $ (€), mais plutôt 39,99 $ (€). Et les poires que nous sommes tous arrondissons alors le montant à son plus bas, soit 39,00 $ (€) au lieu de 40,00 $ (€). Le plat semble ainsi moins cher qu’il ne l’est en réalité.

 

Pourtant, malgré le fait que ce truc soit évident comme le nez dans la figure, malgré qu’il soit connu par tous les consommateurs depuis belle lurette, malgré tout ça, les commerçants et les restaurateurs continuent quand même à en faire usage à tour de bras. Pourquoi ? Oui, pourquoi ? Car il doit sûrement exister un motif secret pour qu’une ruse aussi éculée et flagrante ait toujours la cote comme ça. Eh bien, non, il n’y a aucun motif secret. La raison est fort simple : c’est parce que le truc fonctionne encore ! Eh oui : les moutons que nous sommes persévérons obstinément à nous laisser prendre dans ce piège grossier. Désespérant, je sais…

 

Toujours concernant les prix, une autre astuce pour les restaurateurs consiste à ne pas mettre le symbole monétaire $ (€) accolé aux montants des plats dans les menus. Ainsi, un prix n’est plus 38 $ (€), par exemple, mais plutôt, et tout bonnement, 38.

 

Des études démontreraient en effet que la vision des symboles monétaires augmente le sentiment de perte financière dans nos têtes. En éliminant ce symbole, nous avons l’impression de dépenser moins. Conséquemment, nous devenons plus sensibles à accepter de payer plus cher que nous ne l’aurions fait si le symbole $ (€) avait été présent.

 

Un troisième truc lié aux prix est d’inscrire un plat très cher bien en évidence dans le menu. Le client qui voit ce plat – et ce prix ! – est soulagé d’apercevoir, juste à côté, des plats moins onéreux. Il considère de ce fait ces derniers comme des aubaines, alors qu’ils n’en sont pas du tout – bien au contraire.

 

En résumé, lorsque nous commandons un plat dont le prix réel est de 40,00 $ (€), par exemple, mais qui est affiché 39,99 (sans symbole monétaire), et juste en dessous d’un plat dont le prix est de 60,00 $, dans notre esprit, il se passe trois choses :

 

- le plat en question se situe dans la tranche de la trentaine de dollars (d’euros) ;

 

- il semble moins dispendieux encore du fait que ce montant de 39,99 (sans symbole monétaire) est un genre d’abstraction qui induit que le portefeuille n’en sera pas tellement affecté ;

 

- et il apparait finalement comme une aubaine du fait qu’un autre plat dans le même menu est presque deux fois plus chers que celui-là.

 

Mazette…

 

Les descriptions « émotives »

 

Faire appel à nos émotions, voilà un autre truc des restaurateurs pour orienter notre choix vers les plats qu’ils désirent, eux, que nous commandions. Les astuces sont aussi nombreuses que l’imagination des experts en marketing le permet. Et malheureusement – pour les moutons que nous sommes –, cette imagination est sans limites. Parmi ces moyens, nous retrouvons :

 

- Des descriptions juteuses de mets destinées à nous faire saliver en quelques lignes : « Croustillante poitrine de poulet servie sur un pain artisanal aux graines de pavot garni de salade de chou crémeuse, de cornichons, de laitue et d’une tartinade aux poivrons rouges rôtis »… En fait, il s’agit d’un vulgaire hamburger au poulet.

 

- Des descriptions de mets incluant des noms de marques très connues : « Longe de porc, sauce à la bière de la Nouvelle-France », « Bœuf braisé au vin rouge Beaujolais »… Cela nous rassurerait énormément, apparemment.

 

- Des descriptions de mets évoquant notre enfance : « Ragoût de boulettes de grand-maman », « Tarte aux pommes de ma tante Jacqueline »… Nous associerions alors instinctivement ce genre de plats à des souvenirs agréables.

 

- Des noms et des descriptions de plats authentiques et exotiques : « Crevettes Hariyali », « Penne calabrese piccante »… Cela émoustillerait nos sentiments associés à la différence et à l’aventure – pour ceux qui voudraient se la jouer Indiana Jones au restaurant !

 

- Des noms et des descriptions de plats incluant des produits locaux : « Bavette de veau de la ferme des Rossignols de Charlevoix », « Gigot d’agneau de la Bergerie Lune d’Or », « Tarte au sirop d’érable du Québec »… Cette caractéristique rejoint notre sentiment d’appartenance et d’identité. En tout cas, ici, au Québec, c’est très tendance depuis quelques années. Et les moutons adorent être à l’avant-garde de tout ce qui est tendance.

 

La structure des menus

 

Beaucoup de restaurants mettent en évidence les plats vers lesquels ils veulent attirer notre attention – vers les plus rentables pour eux, bien sûr. Pour ce faire, ils privilégient deux principaux moyens :

 

- en accentuant le nom de ces plats en caractère gras, en couleurs, en les encadrant, etc.

 

- en les accompagnant d’une photo couleur – dont le produit fini, en passant, n’a jamais rien à voir avec ce qui se retrouve finalement dans nos assiettes.

 

Les restaurants haut de gamme se refusent toutefois à utiliser cette tactique qui, selon eux, fait trop people. Le troupeau de moutons fréquentant ce genre de restaurants possède d’autres valeurs. C’est pour cette raison que les restaurants s’adressant à une clientèle snob mettent plutôt l’emphase sur le dépouillement afin de laisser la place à la qualité. De cette façon, tout comme dans les assiettes qu’ils servent sur les tables, il se trouve d’immenses espaces vides dans les menus, mais ces vides sont remplacés par l’excellence de leurs micros contenus.

 

D’autre part, des études ont révélé que le choix des clients se porte très souvent sur le premier élément aperçu par ses yeux dans le menu. De là l’importance pour les restaurateurs de bien repérer ces endroits ! Par chance, et bien sûr, des recherches ont été menées sur cet enjeu. Ainsi, semble-t-il que les meilleurs emplacements sur les menus où doivent être inscrits les plats les plus rentables sont :

 

- le coin supérieur droit ;

 

- si le menu se déplie en trois volets : au centre

 

Et tout cela en mettant l’emphase sur la section des plats principaux, car c’est apparemment là que le client va jeter un œil en premier afin de se faire une idée générale du rapport qualité-prix dont il doit s’attendre.

 

L’ambiance

 

Pour terminer cette liste d’astuces destinée à gonfler la facture du client, il en existe une dernière qui fait un peu flipper lorsque l’on prend conscience jusqu’à quel point notre comportement moutonnier est étudié sous toutes ses facettes.

 

Semble-t-il – des recherches le prouvent – que la musique classique diffusée dans un restaurant augmente notre sentiment de richesse et nous suggère de ne pas nous en faire indûment avec le contenu de notre portefeuille ! A contrario, la musique pop ferait baisser le chiffre d’affaires des restaurateurs de 10 %.

 

En fait, dans un restaurant, plus ce qui nous entoure (matériaux, vaisselle, ambiance feutrée, couleurs, odeurs, qualité de l’accueil…) inspire la richesse et le luxe, plus nous sommes portés à nous associer à cette classe de la société – et à dépenser en conséquence !

 

 

(1) Tiré en partie de l’article intitulé «  12 astuces pour vous faire dépenser plus au restaurant », par Benoîte Labrosse, dans le site Protégez-vous, 24 juillet 2014.

 

 

 



20/07/2019
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